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[La semaine infernale, Frédéric Jannin] Vives les journées sans

The 2008-05-01 at 08:00 by Eddy. In La Semaine Infernale.

Dimanche dernier, c’était amusant, cette “journée de la mobilité”. J’ai eu la chance de faire un petit tour en voiture, juste avant l’heure fatidique, et de partager le macadam urbain avec les vrais intoxiqués du moteur, qui “en fumaient vite une petite dernière”, devant les regards indignés des piétons, visiblement pas au courant que l’opération “journée sans voiture” commençait à neuf heures. Un poil plus tard, c’était vraiment amusant d’observer les hordes de cyclistes, sourire aux lèvres et langue pendante dans les côtes, arpenter les rues de Bruxelles, narguer fièrement les pauvres véhicules fixés au sol et toiser, avec arrogance, cette pléthore de panneaux animatronics plantés un peu partout le long des routes et supposées culpabiliser à mort les automobilistes qui dépassent le 30 km/h. Là, ils arboraient tous un petit smile de remerciement. Mais évidemment qu’on ne dépasse pas les 30, à vélo, bêtes machines ! Fallait voir ces familles de vélocipédistes : “Allez les enfants, vous allez voir, c’est très chouette ! on fait une graaaaaande ballade à vélo, c’est bon pour la santé, et puis d’abord, on n’a pas acheté des vélos pour rien, et puis ça vous permettra de voir la ville autrement !” “Mais allez, quoi, y’a Chose à la télé, et puis on m’attend sur MSN et puis j’ai des trucs à faire pour l’école, et puis d’abord je dois étudier mon examen pour le permis de conduire. D’ailleurs Kevin, dans un mois, il a déjà sa Golf…” C’était marrant aussi d’écouter ce calme, d’un quartier à l’autre, d’entendre le lourd silence d’une ville sans moteurs. Juste, çà et là, le bruit des tondeuses à gazon, puisqu’il faisait grand soleil, et le “brrrrrr” de quelques rollers, à peine plus fort que des cartes à jouer, fixées dans les rayons avec une pince à linge, comme on faisait avant. Bon, il y avait tout de même les ambulances, pour ceux qui ont perdu l’équilibre sur deux roues. Et puis les bus et puis les taxis… On peut espérer que ces grappes de pelotons redorent quelque peu le blason d’une certaine image un peu pourrie du cyclisme. Quoique. “Bon, les enfants, dimanche, comme on passe la journée à vélo, on ne va pas tenter le diable, hein, vous allez tous me prendre une petite piqûre d’EPO ! Un bon pot belge !” “Ouaaaah ! ça pète à mort, le vélo, dis !” . Mais quoi, moi, je dis bravo à toutes ces belles initiatives de casser les rythmes effrénés de notre bête monde moderne. Je les applaudis, ces journées à thème, la plupart du temps à vocation de nous donner bien bonne conscience face à notre planète presque en rupture de stock. Ben sûr qu’on peut s’en passer, de ce pétrole, déjà qu’un jour il n’y en aura plus et qu’alors, il faudra quand même bien reprendre sa bécane.

Est-il nécessaire de rappeler à ceux qui l’auraient oublié ou d’informer ceux qui ne le sont pas que dimanche prochain, c’est la fameuse journée sans cons ? Si vous êtes cons, à moins d’une dérogation spéciale, il vous sera interdit de flâner en ville et ce, de neuf à dix-neuf heures. Vous imaginez l’orgasme ! Une ville remplie de sains d’esprit, de chouettes gens, sympas, sans plus d’emmerdeurs, de bien-pensants, d’imbéciles, de “moi je sais”, de connards. Une ville bien propre, nettoyée, en tout cas pour un moment, de tous les cons qui nous gâchent la vie à longueur de journée. Quelle bonne idée, dis ! Vous allez voir qu’il y en aura encore pour se plaindre. Les imbéciles couillons vont leur manquer. Ouais mais c’est vrai, une journée sans bagnole, ça passe mais sans cons, qu’est-ce qu’on s’ennuirait ! C’est triste, une ville sans cons. Vivement dix-neuf heures.

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