[La semaine infernale, Sergio Honorez] Gosselies-Bierset-Gore
The 2008-05-01 at 08:00 by Eddy. In La Semaine Infernale.
C’est dingue. Pendant des années, on a laissé faire, on s’en foutait complètement, et aujourd’hui, voici qu’on fait la chasse aux fumeurs. Pendant toutes ces années, c’est sûr, on savait que ce n’était pas bon pour la santé, et il y avait toujours un petit malin pour vous dire que jamais on interdirait la cigarette, parce que grâce aux taxes, l’état s’en mettait plein les poches. Mais voilà qu’un beau jour, un autre petit malin a compté, et recompté, et il a si bien compté qu’il s’est aperçu que, pour la Sécu, le coût des maladies liées à la consommation de cigarettes était de loin supérieur au montant des accises et taxes récoltées auprès des fumeurs. Donc, haro sur la cigarette.
C’est dingue. Pendant des années, on a laissé faire, on s’en foutait royalement, on polluait à toute berzingue. Bien sûr, pendant toutes ces années, on savait que c’était pas bien terrible pour la santé de nos enfants, que les réserves n’étaient pas inépuisables, et qu’on rendait la terre invivable plus vite que ne l’avaient jamais fait les générations antérieures. Mais, heureusement, il y avait toujours un petit malin pour nous dire que, de toute façon, ça ne changera jamais, parce que les taxes sur l’essence et le fioul de chauffage rapportent tellement à l’Etat que jamais, au grand jamais, on ne polluerait moins, parce que grâce aux taxes, l’Etat s’en mettait plein les poches.
Mais voilà qu’un beau jour, un autre petit malin, du nom de Nicholas Stern, a compté, et recompté, et il a si bien compté qu’il s’est aperçu que si on continuait comme ça, le réchauffement de la planète coûtera tellement cher à l’économie mondiale qu’elle ne se relèverait jamais. Ça, ça fait réfléchir. Cette révélation en fut également une pour le ministre wallon André Antoine, qui interdit immédiatement à une compagnie aérienne à bas prix de mettre sur pied une liaison régulière entre Charleroi et Liège. Il faut dire qu’en Belgique, on n’est pas vraiment des petits malins, et parmi les pays signataires du protocole de Kyoto, on est parmi les moins bons élèves.
Et puis, il n’y a pas que le rapport de Nicholas Stern qui a pesé sur la décision du ministre Antoine. La veille, il avait été au cinéma. Voir un film gore. Pardon, de Al Gore. Sur le réchauffement de la planète. Ils étaient 200 ministres. Je ne savais pas qu’il y en avait autant des ministres. Mais avec 20 cartes UGC Unlimited, ça ne devait pas grever le budget de l’Etat. Comme la fois où ils ont tous été voir Rosetta ensemble. Ca, c’était plus cher, parce qu’ils ont été tous à Cannes, et on ne fait pas de cartes UGC Unlimited pour aller à Cannes. Deux semaines plus tard, ils nous sortaient le plan Rosetta pour sauver l’emploi en Wallonie ! J’imagine que c’est à Carolywood que les élus carolorégiens se sont payé une séance collective des trois épisodes du “Parrain” pour en arriver là où ils sont. Mais je m’éloigne de mon sujet.
Donc, le ministre Antoine a interdit ces vols “saut de puce” entre Bierset et Gosselies, après avoir entendu que la pollution, ça allait coûter cher à tout le monde, et après avoir vu la “Vérité qui Dérange” sur le réchauffement climatique. Si l’initiative ministérielle est suscitée par la vision d’un film, je me demande bien ce qu’ils vont nous inventer après la vision commune de “Pompiers en Chaleur” ou de “Ainsi va le Vit”. Cela dit, c’est plutôt une bonne décision, quand on pense qu’un décollage de jet provoque des émissions de gaz à effet de serre sept à dix fois plus importants que celles d’un bus. Finalement, grâce à un rapport tout ce qu’il y a de plus néo-libéral, né dans le bureau d’une de ces sociétés de consulting type Ernst & Young ou Arthur Andersen, qui brandit le spectre de la récession, de krachs boursiers, et de moins-values en pagaille, l’urgence d’une politique internationale responsable de l’environnement est enfin mise à l’ordre du jour. Alors, qu’il y a quelques semaines, on laissait ça aux écolos et militants de Greenpeace. C’est le monde à l’envers. Ca n’arrive qu’au cinéma, ces choses-là.
